Les pressions économiques menacent la liberté de la presse dans le monde, alerte RSF

Fermetures massives de médias d'information, domination des GAFAM, mainmise des milliardaires... Les pressions économiques menacent la liberté de la presse, alerte Reporters sans frontières (RSF), pointant notamment une "dégradation inquiétante" aux États-Unis sous le mandat de Donald Trump.
D'après le classement annuel de l'ONG, publié vendredi à la veille de la journée mondiale de la liberté de la presse, médias et journalistes sont confrontés à des situations "problématiques", "difficiles" ou "très graves" dans les trois quarts des 180 pays évalués.
"Pour la première fois", la situation devient "difficile" à l'échelle du monde, souligne RSF, désignant plus particulièrement le poids des contraintes économiques, illustrées par le cas américain.
Loin de la Norvège, première du classement pour la neuvième année consécutive, les États-Unis perdent deux places et se retrouvent en 57e position, derrière la Sierra Leone.

"La situation n'était déjà pas reluisante" dans le pays, rétrogradé de dix places en 2024, concède auprès de l'AFP la directrice éditoriale de RSF, Anne Bocandé.
Mais elle s'est encore aggravée depuis l'investiture en janvier du président américain, auteur d'"attaques quotidiennes" contre la presse.
"La liberté de la presse n'est plus un acquis aux États-Unis", constatait également plus tôt cette semaine le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), dans un rapport sur les 100 premiers jours du second mandat de Donald Trump.
"Déserts informationnels"
Ce dernier a signé jeudi un décret demandant de cesser de financer deux réseaux publics emblématiques, PBS et NPR, qu'il accuse d'être biaisés. Il avait auparavant initié le démantèlement des médias publics américains à l'étranger, comme Voice of America, privant "plus de 400 millions de personnes" d'un "accès à une information fiable", selon RSF.
"Le gel des fonds d'aide internationale", via l'Agence américaine de développement USAID, a en outre "plongé des centaines de médias dans une instabilité économique critique" et contraint certains "à la fermeture, notamment en Ukraine" (62e, -1 place).

Parallèlement, de "vastes déserts de l'information" se créent aux États-Unis avec la disparition de nombreux titres locaux en proie à des difficultés financières.
Ces "pressions économiques", moins visibles que les exactions physiques, constituent une "entrave majeure" à la liberté de la presse, insiste RSF, appelant à un "New Deal pour le journalisme".
"Dans près d'un tiers des pays du monde", dont la Tunisie (129e, -11) et l'Argentine (87e, -21), "des médias d'information ferment régulièrement, sous l'effet des difficultés économiques persistantes".
Une trentaine de pays se distinguent par ailleurs par "des fermetures massives ayant provoqué, ces dernières années, l'exil de journalistes", comme le Nicaragua (172e, -9) ou l'Afghanistan (175e, +3).
En Palestine (163e,-6), la situation est "désastreuse", selon RSF, qui accuse l'armée israélienne d'avoir "détruit des rédactions et tué près de 200 journalistes", tandis que "l'absence de stabilité politique" en Haïti (112e, -18) "plonge l'économie des médias aussi dans le chaos".
"Asphyxie"
Plus généralement, l'économie du secteur est "mise à mal" par les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), dont les plateformes, "largement non régulées, captent une part croissante des revenus publicitaires" et participent à "la prolifération de contenus manipulés ou trompeurs".

La liberté d'informer est aussi "de plus en plus entravée par des conditions de financement opaques ou arbitraires", comme en Hongrie (68e, -1) où "le gouvernement asphyxie les titres critiques via la distribution inéquitable de la publicité d'État".
Même dans des pays "bien positionnés" comme la Finlande (5e) ou l'Australie (29e, +10), la concentration des médias, "menace pour le pluralisme", reste "un point de vigilance".
Ainsi, en France (25e, -4), une "part significative de la presse nationale est contrôlée par quelques grandes fortunes", relève RSF, s'interrogeant sur "l'indépendance réelle des rédactions".
La situation de la liberté de la presse est qualifiée de "très grave" dans 42 pays, dont sept font leur entrée dans cette catégorie (Jordanie, Hong-Kong, Ouganda, Ethiopie, Rwanda, Kirghizistan et Kazakhstan).
L'Eryhtrée reste en dernière position, derrière la Corée du Nord et la Chine.
RSF réalise ce classement à partir "d'un relevé quantitatif des exactions commises envers les journalistes" et "d'une étude qualitative" auprès d'experts.
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